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    Au chant du coq

    Une nouvelle de Gilbert JULLIEN

     
    A Lansac, petit village des Pyrénées-Orientales, une étrange histoire circule...Il se dit qu'au Moyen-âge, le seigneur Simon IV de Montfort et ses hommes auraient massacrés tous les villageois les soupçonnant d'avoir hébergés des cathares. Après sa croisade en Terre-Sainte, Simon de Montfort avait été chargé par le pape Innocent III d'organiser des expéditions punitives contre tous les hérétiques et c'est ainsi que commença la "fameuse" croisade contre les Albigeois. On l'appela "croisade" car les chevaliers et leurs soldats s'étaient vu octroyer les mêmes avantages et faveurs que ceux qu'ils avaient obtenus en se rendant à Jérusalem. A Lansac, il se dit que cette tuerie qui serait intervenue en 1209 ou 1217 (les avis des historiens sont partagés), ne serait, sans doute, pas arrivée si un coq ne s'était pas mis à chanter à tue-tête au moment où la troupe de Simon de Montfort passait non loin de là, alors que les villageois , eux, étaient partis se cacher dans la tour caroligienne, blottie dans le bois, qui domine le hameau. De ce fait, dont on se sait plus s'il est réellement historique ou légendaire, le village de Lansac en a fait aujourd'hui un petit parcours pédestre qui s'intitule "Au chant du coq". Moi, après avoir effectué cette courte balade et avoir eu vent de cette histoire, il m'est venu l'idée d'écrire cette petite nouvelle.....

    Joan était un gamin  de 13 ans et comme il le faisait souvent, il était parti chasser à l’arc avant même le lever du jour sur une des serrats qui domine son village de Lanciano (Lansac à l’époque médiévale) . Soudain, il aperçut du côté du col de l’Auzine, une importante troupe de soldats se dirigeant droit vers le petit hameau. Pour gagner du temps, il emprunta plusieurs raccourcis puis tout en dévalant le dernier talus, il essaya de se souvenir de ce qu’il avait vu afin d’en faire part aux doyens du village. Joan avait vu de nombreux archers et fantassins mais aussi quelques cavaliers, mais ce qui l’avait effrayé par-dessous tout, c’était cet horrible lion rugissant, gueule grande ouverte avec d’impressionnantes griffes ornant un étendard rouge. Cet effroyable drapeau qu’un chevalier en armure brandissait bien haut, flottait dans le vent et à chacune des rafales, le lion argenté semblait vouloir donner de violents coups de dents et de griffes à un ennemi invisible ayant l’audace de l’affronter. Joan coupa à travers champs et commença à prévenir au passage les premiers villageois rencontrés. C’est donc un petit attroupement qui se forma rapidement au centre du hameau où Joan raconta rapidement son histoire car le temps était compté avant l’arrivée des soldats. Quand Joan rajouta qu’un autre cavalier tenait un étendard blanc orné d’une croix et que plusieurs soldats arboraient fièrement cette même croix sur leur poitrine, les plus érudits du village comprirent immédiatement à qui ils avaient à faire : c’était Simon de Montfort et ses mercenaires, anciens croisés de Jérusalem dont la principale mission était désormais de combattre les hérétiques. Convaincu que le Pays Fenouillèdes était devenu un repère de cathares, Simon de Montfort n’avait de cesse de massacrer avec zèle les villageois languedociens hébergeant des « Albigeois» et des « Parfaits ». Il y a quelques années, un prédicateur était passé à Lanciano mais depuis le hameau vivait paisiblement et personne n’hébergeait de cathares. Mais comme les carnages perpétrés par Simon de Montfort se faisaient souvent sans raison apparente, les plus anciens connaissaient le danger qu’il y avait à s’exposer à cette troupe et ils prirent immédiatement la résolution de quitter le village pour se rendre à la vieille tour carolingienne toute proche. Pendant que les habitants partaient se cacher dans la forêt et la tour, Joan décida de poursuivre jusqu’à sa chaumière située en dehors du village pour prévenir ses parents. Après avoir visité de fond en comble la petite masure, il dut se rendre à l’évidence, ses parents avaient été avertis et n’étaient déjà plus là. Au moment même où Joan était sur le point de sortir de la maison, il entendit le bruit des galops d’un cheval. Alors, pris de panique, il descendit se réfugier dans la cave où il trouva comme seule cachette un petit tonnelet de vin à moitié plein. Il s’introduisit dans le tonneau et se mit aussitôt à frissonner car le vin était très froid mais ses tremblements redoublèrent quant il entendit clairement le bruit très lourd des solerets de mailles retentir sur le plancher puis sur les marches de l’escalier de bois menant à la cave. Au moment même où il tentait de maîtriser sa peur, quelqu’un souleva la petite barrique et Joan comprit parfaitement qu’il montait, lui aussi, avec elle dans les airs. A cet instant, Joan entendit distinctement un coq se mettre à chanter à tue-tête dans le lointain puis ce fut les exhortations d’un homme qui criait : « Enric laisse tomber le vin ! Enric pose ce tonnelet et vient avec moi, Simon nous réclame auprès de lui ! ». Le tonnelet se mit à rouler et Joan s’immobilisa avec lui. A la fois étourdi par les vapeurs du vin et les culbutes qu’il venait d’effectuer, Joan attendit qu’un silence absolu se réinstalle avant de risquer un œil à l’extérieur. Quand le bruit des sabots des chevaux cessa et que seuls les cocoricos continuaient à retentir dans le lointain, Joan poussa le couvercle et sortit de la barrique. Il n’y avait plus personne dans la cour de la ferme et seules quelques poules picoraient comme à leur habitude. Tout à coup, le chant incessant du coq fut couvert par des clameurs qui venaient de la tour et de la forêt. Il s’agissait clairement de bruits de combats mais surtout d’hurlements de souffrance, de braillements et de plaintes d’hommes et de femmes que l’ont martyrisé. Apeuré et pris de spasmes incontrôlables, Joan quitta sa maison et partit se cacher dans un fossé à l’abri d’une haute haie où il se mit à grelotter d’effroi. Il resta ainsi plusieurs heures à écouter le vacarme de la bataille qui se déroulait non loin de lui. Puis quand le silence s’installa, Joan comprit, que le pire qu’il avait tant voulu éviter,  était malheureusement arrivé. Se croyant désormais seul au monde, il se mit à gémir et à pleurnicher mais quand il vit les cavaliers suivis des soldats passer sur le chemin, il comprit immédiatement que son salut passait par la discrétion et il s’arrêta immédiatement de pleurer. Le lendemain, il se décida à sortir de sa retraite où il avait passé toute la nuit. Il retrouva avec joie et soulagement son père Matèu assis sur le perron de la maison mais ce dernier, la tête enfouie dans les mains était entrain de pleurer lui aussi. Matèu savait déjà qu’il était un des rares à avoir survécu au massacre perpétré par Simon de Montfort mais quand il constata que Joan était vivant lui aussi, il le serra très fort et longuement dans ses bras en remerciant le ciel. Mais Matèu continuait à se lamenter en disant : « Jamais, je n’aurais du accepter que ce maudit coq nous suive quand nous nous sommes enfuis avec ta mère », puis il rajoutait : « si ce satané coq ne s’était pas mis à chanter, les soldats auraient passé leur chemin et tout ça ne serait pas arrivé ! » puis culpabilisant, il ne cessait de répéter « c’est ma faute et celle de ce damné coq si ta mère est morte et avec elle tous les gens du village » puis serrés dans les bras l’un de l’autre, ils pleurèrent longtemps la perte de l’être cher.  De temps à autre, Matèu se mettait à vociférer : « il faut que je le retrouve ce coq et je vais lui faire la peau ». A intervalles réguliers, le coq chantait encore sur les hauteurs de Lanciano et Joan dit alors à son père : «  Non, papa, je vais aller le chercher et je vais le ramener vivant, car à moi, il m’a sauvé la vie ce coq ! ». Joan raconta l’histoire du tonnelet à son père qui comprit que le coq n’était pour rien et que seule la fatalité était imputable à cette tuerie perpétrée par Simon de Montfort et ses hommes. Le coq par fidélité avait suivi son maître comme il avait pris l’habitude de le faire depuis que Matèu l’avait élevé alors qu’il n’était encore qu’un minuscule poussin. Ce matin-là, le coq  avait suivi Matèu dans la forêt jusqu’au fortin mais les autres jours, c’était dans les champs de céréales ou bien dans les collines arides qu’ils avaient pris la marotte d’arpenter ensemble.  Et puis, n’était-il pas naturel pour un coq de s’époumoner au lever du jour ? Joan partit chercher le coq du côté de la tour à signaux que les soldats avaient complètement disloquée et ruinée. Les portes étaient béantes et les murs étaient désormais écroulés. Tout autour, le sol était jonché, de toute part, d’une trentaine de corps transpercés de flèches ou mutilés par les fléaux et les lances. Le gallinacé sans doute un peu perdu dans ce décor qu’il ne connaissait pas, chantait toujours dans les parages de la tour. Joan quitta volontiers le macabre fortin bien décidé à mettre le grappin sur le coq. Il le coursa ainsi une bonne partie de la journée puis il finit par l’attraper le soir au sommet du roc dominant Lanciano. Joan, Matèu et quelques survivants n’oublièrent jamais ce jour-là où l’aube avait été si funeste mais ils se remirent à travailler leurs lopins de terre comme ils l’avaient toujours fait auparavant. L’existence ne fut plus jamais la même mais le hameau retrouva peu à peu un semblant de vie antérieure... égayait aux aurores, comme depuis toujours, par les chants harmonieux d’un coq.


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  • Coucou, coucou, coucou !

     
     
    Coucou, coucou, coucou !
     

    Il chante  le coucou sur la branche de houx.

    Hou, hou, hou, où es-tu lui réponds le hibou ?

    Je suis là à chanter à me tordre le cou.

    Mais pourquoi fais-tu ça, tu n’es pas un peu fou ?

     

    Hou, hou, hou !

     

    Voilà comment bouboule notre ami le hibou,

    Où, où, où, où es-tu lui dit le caribou.

    Je cris ainsi la nuit par peur du loup garou.

    Mais pourquoi fais-tu ça, tu n’es pas un peu fou ?

     

    Brou, brou, brou !

     

    Du fond de sa forêt, il brame le caribou

    Où, où,  où, où es-tu lui dit le loup garou

    Je suis là bien caché tout au fond de mon trou

    Mais pourquoi fais-tu ça, tu n’es pas un peu fou ?

     

    Hou, hou, hou

     

    Il gronde, hurle et jappe le méchant loup garou,

    Où, où, où, où es-tu lui dit le carcajou

    J’ai mon estomac vide qui est vraiment à bout

    Mais pourquoi fait-il ça, il n’est pas un peu fou ?

     

    Mouh, rouh, bouh !

     

    Voilà, le petit ours dans la gueule du loup,

    Où, où, où suis-je, beugle le carcajou

    Tu es entre mes dents réponds le loup garou

    Mais pourquoi fais-tu ça, tu n’es pas un peu fou ?

     

    Hou, hou, hou,

     

    Désolé petit ours, je suis un grand filou,

    Qui ne mange ni choux, encore moins des cachous

    Mais tu as du bagou lui dit le carcajou,

    Mais pourquoi dis tu ça, tu n’es pas un peu fou ?

     

    Pouh, pouh, pouh !

     

    Le petit carcajou pris ses jambes à son cou

    Il grimpa au sommet d’un grand bois d’acajou

    Puis il se mit à rire, à lancer des coucous

    En direction du loup qui est devenu fou.

     

    Coucou, coucou, coucou !


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  • L'impasse Emile

     

    Elle ne menait pas à un palace,

    Mais à une merveilleuse terrasse

    Donnant sur la plus belle des anses,

    La petite impasse de mon enfance.

     

    Au loin, on y voyait des iles,

    Quand on montait l’impasse Emile,

    Et si elle n’était qu’un cul de sac,

    Moi j’y voyais la vie, la mer et son ressac.

     

    J’arrivais à  mon domicile,

    Quand je montais l’impasse Emile,

    Et si c’était là le terminus,

    Moi, j’y vivais comme Crésus.

     

    Mes richesses, c’était mes jouets,

    Que dans l’impasse, j’faisais rouler,

    Et comme la pente était sévère

    Moi, j’y jouais toujours parterre.

     

    L’impasse était sombre la nuit

    Et menait au numéro huit.

    Pourtant nous n’avions jamais peur,

    Nous étions tous des bagarreurs.
     
     

    Pour les copains de mon quartier,

    L’impasse était un vrai sentier,

    Nous y faisions nos réunions,

    Entre amis et vrais compagnons

     

    Et puis un jour de ma jeunesse,

    Je suis parti à une autre adresse,

    Et si ailleurs j’ai cherché ma place,

    Mes souvenirs sont restés dans l’impasse.


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  • Mon jardin secret

    JARDIN-SECRET

    J’ai ouvert le portail de mon jardin secret

    J’ai cherché dans les roses espérant t’y trouver.

    Jardin à la française, j’avais tant cultivé

    Les plus belles des fleurs que mon cœur butinait.

     

    J’ai marché dans la cour de mon jardin secret

    Et au milieu des arbres, il y avait un pommier.

    J’ai croqué une pomme et tu es arrivée

    Dans une robe légère au blanc immaculé.

     

    J’ai couru dans l’allée de mon jardin secret,

    Avec les bras ouverts afin de t’embrasser

    Mais tu as disparu et tu t’es opposée,

    A cette belle rencontre dont j’avais tant rêvé.

     

    J’ai fermé le portail de mon jardin secret,

    Les yeux remplis de larmes, mes pensées embrumées,

    J’avais perdu espoir un jour de t’y trouver,

    Ô toi la demoiselle de mon jardin secret.


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  • Ils pétillent, ils pétillent....

     

    YEUX

     

    Ils pétillent, ils pétillent,

    Les yeux de la jolie fille.

    Enfermée dans sa coquille,

    Son amour est prisonnier.

     
     
    Ils pétillent, ils pétillent,

    Les yeux de la jolie fille.

    Son cœur est une bastille

    Qui attend la liberté.

     

    Ils pétillent, ils pétillent,

    Les yeux de la jolie fille.

    Allongée sur les brindilles

    Elle attend son chevalier.

     

    Ils pétillent, ils pétillent,

    Les yeux de la jolie fille.

    Elle sourit sous la charmille

    En voyant un cavalier.

     

    Ils pétillent, ils pétillent,

    Les yeux de la jolie fille

    Mais moi j’ouvre mes pupilles,

    Et je vais la libérer.

     

    Ils pétillent, ils pétillent,

    Les yeux de la jolie fille

    Et agile comme une anguille

    J’ai battu son geôlier.

     

    Ils pétillent, ils pétillent,

    Les yeux de la jolie fille.

    Et comme elle est très gentille

    J’ai baisé ses lèvres mouillées.

     

    Ils pétillent, ils pétillent,

    Les yeux de la jolie fille.

    Et c’est pour la vie qu’ils brillent.

    Je m’en vais la marier.


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